Propos recueillis par Alioune DIENG, Kamongnin SYLLA et Lucien TUKUI HLAGA
Dans cet entretien exclusif, Enricka MH, réalisatrice du court-métrage Le Génie, sélectionné au prestigieux Festival Dakar Critique, revient sur son œuvre, son parcours et ses ambitions. Une plongée dans l’univers d’une cinéaste talentueuse et engagée.
Félicitations pour la sélection de votre film au Festival Dakar Critique. Pour nos lecteurs, comment décririez-vous Le Génie en une phrase ?
Enricka MH : Merci beaucoup ! Le Génie est un conte urbain à hauteur d’enfant, mêlant humour et magie, tout en explorant les problématiques sociales des quartiers populaires.
Votre film semble mêler fantastique et réalisme social. Qu’est-ce qui vous a inspiré cette histoire ?
Enricka MH : L’idée m’est venue très tôt. Enfant, j’adorais les récits fantastiques, mais je constatais toujours qu’ils mettaient en scène des enfants issus de milieux éloignés du mien, souvent dans des contextes nord-américains ou européens. J’ai voulu créer une histoire où les enfants des quartiers populaires, que je connais bien, sont au centre d’un récit magique. Ce film est né d’un désir de représentation et d’une envie d’apporter une touche de magie à ces territoires.
Adam, le personnage principal, est confronté à une lourde responsabilité dès ses 13 ans. Pourquoi ce choix narratif ?
Enricka MH : Adam incarne ce que vivent de nombreux aînés de familles nombreuses : la responsabilité précoce. Moi-même, ayant grandi dans une grande fratrie, j’ai vu comment mes aînés devaient très tôt veiller sur les plus jeunes. C’est une réalité que je voulais explorer, tout en montrant la complexité émotionnelle qui en découle.
Parlons de Seidou, ce personnage mystérieux. Pourquoi lui donner un rôle central ?
Enricka MH : Seidou est un personnage à double facette. D’abord perçu comme une menace, il s’avère porteur de sagesse et d’aide. J’aime jouer avec les apparences dans mes récits. Seidou est à la fois ancré dans les réalités du territoire et enveloppé de mystère. Il représente l’idée que, parfois, les solutions viennent d’endroits ou de personnes inattendues.
L’esthétique de votre film, marquée par des scènes nocturnes, est très particulière. Quelles étaient vos intentions ?
Enricka MH : La nuit est fascinante. Elle est propice à la peur, à l’émerveillement et à l’imaginaire. Avec des enfants comme protagonistes, je voulais capturer cette ambiance où tout semble amplifié : les bruits, les ombres, les sensations. Ces éléments contribuent à plonger les spectateurs dans l’univers d’Adam et Lina, à la fois fragile et empreint de magie.
Votre film aborde aussi des thèmes sociaux profonds. Était-ce une volonté délibérée ?
Enricka MH : Oui, totalement. Derrière la magie et l’humour, Le Génie traite de sujets graves comme la précarité, les violences systémiques et l’injustice. Je voulais rappeler qu’il est crucial de rester solidaires, surtout dans des contextes difficiles. Le lien entre Adam et Lina illustre cette solidarité indispensable dans un environnement souvent hostile.
Comment avez-vous réagi à votre sélection au Festival Dakar Critique ?
Enricka MH : J’étais très heureuse ! Ce festival est une plateforme incroyable pour le cinéma africain et pour des récits comme le mien. Apprendre que mon travail était reconnu ici m’a beaucoup touchée.
Quels sont vos projets futurs ?
Enricka MH : Je travaille actuellement sur le scénario de mon premier long-métrage à la FEMIS, mais je reste attachée au format court-métrage. J’ai encore beaucoup d’histoires à raconter, notamment autour des quartiers populaires et de leurs défis. Je suis également ouverte à des collaborations, surtout en Afrique, où le talent et l’innovation cinématographique sont en pleine effervescence.
Un dernier mot pour nos lecteurs ?
Enricka MH : J’espère que Le Génie vous inspirera autant qu’il m’a inspirée. Croyez en la magie des récits, mais surtout en la puissance de la solidarité.
Une réalisatrice prometteuse à suivre de près. Enricka MH, à travers Le Génie, propose un cinéma poétique et engagé qui résonne au-delà des écrans.
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